Pour certaines personnes diabétiques, le travail se gère sans heurts ni difficultés. Ou tout au moins, le diabète ne rend pas leur activité professionnelle plus compliquée, et le travail n’impacte pas négativement leur vécu de la maladie. Cela dit, pour d’autres, il en est autrement… Avoir un diabète et mener de front son activité professionnelle n’est pas toujours de tout repos. C’est, parfois, se battre pour choisir son travail, car certains métiers excluent d’office les personnes diabétiques. Les patients peuvent craindre d’être déclassés, voire de perdre leur travail. Et au quotidien, c’est aussi devoir gérer son diabète dans un univers pas spécifiquement pensé, ni adapté pour les patients.

Les Diabèt’Acteurs interviewés disent que lorsqu’ils rencontrent des formes de solidarité au travail, grâce à l’écoute, aux conseils, aux accompagnements ou aménagement mis en place pour les aider au mieux, alors ils s’en sortent grandi. Ils vivent d’autant mieux leur diabète dans l’exercice de leur activité professionnelle. Mais parfois, les choses se passent de façon plus brutale, et le patient peut se trouver fragilisé par des conditions de travail difficiles… Alain 52 ans, diagnostiqué il y a maintenant 20 ans, Boris 51 ans et diabétique depuis 2 ans et Lisa 42 ans, diagnostiquée il y a 3 ans ont parlé de la relation entre travail et diabète. Nous vous le partageons ici.

Être accompagné pour bien vivre son diabète au travail

Alain anciennement aide-soignant dans une maison de retraite a parlé de son diabète, et il a pu profiter d’une grande écoute et d’une compréhension de sa direction. Cette dernière a essayé de faire au mieux pour qu’il puisse garder son poste dans les meilleures conditions possibles, notamment en aménageant le rythme et l’organisation de son travail. « Ils ont quand même essayé de faire au mieux, de me garder, ça a quand même été fait dans un bon esprit ». Les arrêts maladies à cause du diabète ne lui ont pas été reprochés. Ses absences pour se rendre aux rendez-vous médicaux non plus. Bien entendu, cela n’a pas toujours été totalement fluide… Il y a eu plusieurs tentatives d’aménagement d’horaire, du lieu de travail, mais qui n’ont pas systématiquement fonctionné. « On m’a même changé d’étage pour être dans un environnement plus agréable ». Alain retient surtout cette bienveillance à son égard, une forme de soutien de sa direction et de tentatives échouées mais qui ont au moins eu le mérite d’avoir été essayées.

Pour Alain, ses collègues ont été très présents. Ils l’ont aidé à réaliser ses tâches les plus physiques ou à faire en sorte de les rendre moins éprouvantes physiquement pour lui. « Quand vous avez fait 15 toilettes (à des patients) des fois ils m’en faisaient une de plus ou deux de plus mais ils ne pouvaient pas faire ça tous les jours ». Cela témoignage selon lui d’une forme de solidarité, relativement informelle. Et c’est d’ailleurs ce qui a participé à lui donner une meilleure qualité de vie au travail avec son diabète.

Un manque actuel d’information sur le diabète

Au moment de l’annonce du diabète de Boris (anciennement conducteur de train) c’est toute sa vie, et sa carrière professionnelle, qui s’en sont trouvées bousculées. Un diabète découvert de façon inattendue et soudaine à l’occasion d’un infarctus alors qu’il n’était « jamais malade jamais fatigué » avant cet événement. Un moment d’autant plus inconfortable que tout est à gérer en même temps : digérer l’annonce de la maladie, apprendre à vivre au quotidien avec, être attentif à ses sensations corporelles et réussir à les interpréter pour adapter son traitement, etc. Au domicile, c’est pareil, il faut changer certains détails, comme par exemple installer son matériel de soins dans la salle de bain et les poubelles de tri des déchets spécifiques à proximité. Mais au travail le contexte est autre, cela peut demander une réorganisation d’un autre niveau pour gérer son diabète et pratiquer ses soins. Parce que bien souvent, les patients ne s’injectent pas avec autant d’aisance l’insuline (par stylos) face à leur collègue que face à leur conjoint(e).

C’est donc tout un temps d’apprentissage à vivre, mais pas seulement pour la personne qui a un diabète. Car sans sensibilisation, compréhension et information auprès de ses collègues et supérieurs cela peut engendrer par exemple des malentendus. Voire des tensions pouvant rendre la vie au travail totalement insupportable. Ou pire, qui peuvent aboutir à des licenciements.

C’est ce qui est arrivé à Boris, seulement 3 mois après avoir appris qu’il était diabétique. Il s’en est suivi, un véritable parcours du combattant pour retrouver un emploi qui soit adapté à son diabète. Il a orienté ses recherches vers des métiers ne présentant pas d’activité physique trop importante, avec des horaires assez réguliers et nécessitant peu de grands déplacements. Mais en vain… Il conserve un sentiment d’injustice causé par un manque d’écoute de la part de son ancienne direction. D’après Boris, le licenciement aurait pu être évité ! Malheureusement, ses supérieurs lui ont refusé un temps d’adaptation pour s’organiser, pour mettre en place un nouvel équilibre dans sa vie quotidienne,  et éventuellement aménager son poste différemment. « S’ils s’étaient comporté correctement on aurait pu avoir un arrangement à l’amiable.  Comme me laisser le temps de réduire mon taux d’insuline, mon taux de sucre dans le sang et voilà j’aurai peut-être pu reprendre mon poste mais ils n’ont pas cherché à comprendre. »

L’obstacle des complications avec le diabète

Du côté d’Alain, le tableau est moins noir. Il a réussi à évoluer dans sa vie professionnelle avec son diabète. « Moi j’étais bien parti : au départ agent hospitalier je suis monté progressivement, j’ai fait des formations et après je suis devenu agent social. Ensuite je suis passé aide-soignant normal et puis en classe supérieur. Je suis pratiquement arrivé à une place exceptionnelle et mon but était de reprendre des cours pour essayer de passer éventuellement infirmier mais ça m’a ralenti c’est dommage.»

Les complications liées à son diabète, la dégradation progressive de son état de santé a rendu de plus en plus difficile la réalisation de ses tâches professionnelles quotidiennes. La réorientation vers un autre métier plus adapté à son état de santé n’a été qu’un échec. « Après c’est une histoire de compétence et moi dans les bureaux je suis moins compétent donc ça a conduit à ce qu’on prenne une décision radicale ». Alain s’est retrouvé en retraite pour longue maladie.

Lisa apporte un témoignage qui résume assez bien le souhait d’un grand nombre de personne diabétique : « Je ne souhaite pas que ma maladie ait une influence sur ma vie professionnelle ». Car le diabète apporte son lot de craintes, notamment celles de ne pas pouvoir mener son projet professionnel à bien. D’être contraint de se réorienter vers des métiers à priori plus adaptés au diabète mais à l’opposé de ses souhaits et désirs. Ou encore de ne pas pouvoir produire un travail de qualité. Pour que ces craintes finissent par se dissiper totalement, il semble urgent de considérer l’importance de la mise en place d’un accompagnement adapté aux personnes diabétiques dans leur vie professionnelle. Mais aussi d’encourager toutes les solidarités, et d’informer toujours et encore. A bon entendeur !

 

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