La télémédecine est définie comme « une forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication (…) Elle permet d’établir un diagnostic, d’assurer, pour un patient à risque, un suivi à visée préventive ou un suivi post-thérapeutique, de requérir un avis spécialisé, de préparer une décision thérapeutique, de prescrire des produits, de prescrire ou de réaliser des prestations ou des actes, ou d’effectuer une surveillance de l’état des patients ». Le développement de la télémédecine pour les patients diabétiques semble ainsi inévitable. Si plusieurs études ont démontré son efficacité dans le contrôle de l’équilibre glycémique des patients atteints de diabète, plusieurs défis politiques et sociaux sont encore à relever.

Afin de les identifier, le Diabète LAB a réalisé une étude en avril 2020 (TELEMED1), soit un peu avant que la crise de la COVID-19 ne frappe de plein fouet la France. Or, la COVID-19 a favorisé l’essor de la télémédecine. En effet, selon l’Assurance Maladie, son usage aurait été multiplié par 3 entre février et mars 2020 et par 4 entre mars et avril 2020, soit respectivement 36 000 téléconsultations en mars et jusqu’à 56 000 en avril (Assurance Maladie, 2020).

Méthode

De fait, les résultats de cette étude semblent aujourd’hui obsolètes. C’est pourquoi le Diabète LAB a réalisé une nouvelle étude (TELEMED2), dont l’objectif principal était d’évaluer les évolutions associées aux usages de la télémédecine grâce à une enquête diffusée en août 2021. Nous vous proposons une synthèse des principaux résultats.

Résultats

1 820 personnes ont répondu à l’étude TELEMED1 et 1 517 à l’étude TELEMED2. Les caractéristiques des populations étaient similaires sur le plan de genre, de l’âge, du niveau d’études et du type de diabète. Il est ainsi théoriquement pertinent de comparer les résultats de deux études.

Évolutions des pratiques

Prise de rendez-vous en ligne

En 2021, les répondants étaient moins nombreux à déclarer ne pas connaître la possibilité de prendre des rendez-vous en ligne (via Doctolib, par exemple) qu’en 2020 (3,2% contre 8,4%). Les répondants étaient également plus nombreux à déclarer s’en être servi plusieurs fois ou s’en servir régulièrement qu’en 2020 (65% contre 51,8%).

Téléconsultation d’un médecin

En 2021, les répondants étaient moins nombreux à déclarer ne pas connaître la possibilité de « téléconsulter » l’un de ses médecins qu’en 2020 (15,8% contre 29,0%). Les répondants étaient également moins nombreux à déclarer ne pas savoir s’en servir qu’en 2020 (22,1% contre 35,4%).  De fait, ils étaient plus nombreux à déclarer s’en être servi plusieurs fois ou s’en servir régulièrement qu’en 2020 (18,3% contre 7,1%).

Facteurs associés aux usages de la télémédecine

Les personnes utilisant les différentes formes de télémédecine avaient un âge généralement inférieur à 40 ans avec un niveau d’études supérieur ou égale à bac+ et étaient plus de sexe féminin. À l’inverse les personnes n’utilisant pas les différentes formes de télémédecine avaient un âge supérieur à 60 ans avec un niveau d’étude inférieur ou égal au CAP/BEP et étaient plutôt de sexe masculin.

Évolution des représentations

Vitesse de la téléconsultation d’un médecin

En 2021, les répondants étaient moins nombreux à déclarer être « tout à fait d’accord » avec la proposition selon laquelle la télémédecine permettra d’avoir une réponse plus vite que dans le cadre d’un rendez-vous classique (29,0% contre 42,5%) et plus nombreux à déclarer ne pas être d’accord (16,1% contre 10,7%).

Expertise complémentaire

La même tendance s’observe avec la proposition selon laquelle la télémédecine permettra d’avoir des expertises complémentaires à celle du médecin habituel. En effet, en 2021, les répondants étaient moins nombreux à être tout à fait d’accord avec cette proposition (21,2% contre 30,5%) et plus nombreux à ne pas être d’accord qu’en 2020 (16,0% contre 12%).

Relations humaines

En 2021, les répondants étaient plus nombreux à être tout à fait d’accord avec la proposition selon laquelle la télémédecine diminuera les relations humaines et le temps de parole des patients (42,9% contre 36,7%).

Facteurs associés aux représentations de la télémédecine

Les personnes ayant les représentations les plus positives de la télémédecine avaient un âge inférieur à 40 ans, un niveau d’études supérieur ou égal à bac+2 et utilisaient plus les différentes formes de télémédecine que les personnes qui avaient les représentations les plus négatives.

Conclusion

La crise de la COVID-19 semble ainsi avoir permis 1) de faire mieux connaître la télémédecine aux personnes atteintes de diabète, 2) de développer les compétences numériques nécessaires à son utilisation et 3) d’avoir étendu son usage.

Bien que les utilisateurs des différentes formes de télémédecine soient aussi ceux qui en ont les représentations les plus positives, il est possible de supposer que la « confrontation » à la réalité de la télémédecine paraît se traduire par un « désenchantement ». Alors qu’avant la crise de la COVID-19 les bénéfices de la télémédecine sur la vitesse des consultations et les expertises complémentaires n’étaient, pour la plupart des répondants, que des suppositions, l’expérience de la télémédecine a confronté les personnes atteintes de diabète aux limites réelles de cette pratique.

Afin de vérifier cette hypothèse, il faudrait disposer de données dites « appariées » – c’est-à-dire permettant d’identifier un répondant – afin de mesurer l’évolution spécifique des représentations chez les personnes n’utilisant pas la télémédecine en 2020 et l’utilisant en 2021.