Vivre avec son diabète est, comme certains nous le racontent, une sorte de course de fond. En effet, cela peut demander beaucoup d’efforts et d’énergie pour comprendre la maladie et la gérer, pour lutter contre le regard des autres. Cela peut être épuisant. Mais ça aide aussi à mieux s’observer et à se connaître… et parfois à se sentir plus fort. Alexandre, Charlotte et Margaux nous exposent leur rapport qu’ils ont avec leur maladie, et la façon dont ils ont progressivement appris à l’accepter pour qu’elle ne les domine pas… jusque sous la couette !

En parler sous la couette pour se dépasser

Et si le moment des câlins était celui qui rend plus fort avec sa maladie ? Ce moment intime sous la couette qui nécessite bien souvent d’en parler avec l’autre…

Comme l’explique Alexandre « Dans les moments d’intimité, souvent, si je sais que je dois faire quelque chose, je vais quand même contrôler avant » dit-il. Après avoir contrôlé sa glycémie il se resucre si besoin. C’est l’un des moments où il peut avoir l’impression que le diabète prend trop de place. Mais dans le même temps, cela renforce une complicité avec sa femme. Il nous confie avec beaucoup de pudeur toutes les attentions délicates de sa femme, participant à renforcer leurs liens : « Des fois je ne sais pas… il suffit qu’après avoir fait l’amour, je dis que je suis en hypo, elle me dit : t’aurais dû me le dire, on aurait arrêté. »

Alexandre a l’habitude de tout contrôler en ce qui concerne la maladie, c’est pour lui une façon de prouver que son diabète n’est pas un frein dans le quotidien. « Si j’ai commencé quelque chose, je vais jusqu’au bout » dit-il avec détermination.

Charlotte assume pleinement ! Prend, re-prend le contrôle dans l’intimité. « J’ai pris l’habitude d’enlever la pompe, pour ne pas être gênée avec le fil. Mais à la limite mon compagnon me dit : tu peux la garder ça ne me gêne pas. Mais moi ça me gêne dans mes mouvements du coup je prends la décision de l’enlever ». Finalement, c’est un temps où elle se sent confiante en elle : « A partir du moment où c’est moi qui décide, mon compagnon accepte la décision que je prends. »

Margaux nous raconte que le diabète peut renforcer la complicité avec l’autre ! Faire une hypoglycémie lors des moments intimes ne lui pose aucun souci. « Après je fais un test de glycémie parce que cela m’est arrivé de faire des hypoglycémies pendant et après mais on en rigole en fait ». Bien sûr, elle explique qu’il a fallu un peu de temps pour que son compagnon soit à l’aise avec la pompe à insuline. Au début, « étant donné que le cathéter rentre sous la peau, il avait peur de le toucher, de me faire mal ou de l’arracher. Je pense que c’est déjà arrivé de percer mon cathéter sans faire exprès. » Mais ça c’était avant !

Être à l’aise avec sa pompe dans l’intimité et au quotidien est une chose, mais être à l’aise avec la présence de sa maladie en est une autre ! Le diabète peut être perçu, au fil du temps, comme une sorte de compagnon ou alors il peut rester une contrainte de tous les jours.

Faire de la maladie un ami pour réussir à mieux vivre avec

Dans les premières années avec le diabète, Alexandre, 30 ans, diabétique de type 1 était souvent stressé. Il percevait sa maladie comme une charge, « comme quelque chose que je dois rajouter dans ma vie ». Ce sont des journées qu’il passe à s’inquiéter de ne jamais être à la hauteur, de ne pas en faire assez pour prendre soin de sa santé ou de manquer de connaissances pour la gérer. Il a le  « sentiment de ne pas faire assez de sport, et puis j’ignorais un peu les effets concrets de la variation de ma glycémie au quotidien sur mon corps ». Un sentiment également partagé par Charlotte, 65 ans, diabétique de type 1. Le diabète a toujours occupé une place importante dans sa vie, une contrainte. Elle a toujours vécu avec en étant consciente qu’elle était « obligée » de se surveiller de manière attentive afin d’éviter des complications. Ce n’est pas insurmontable, bien sûr, mais cela peut représenter une certaine charge mentale, car elle y pense tout le temps.

Alexandre a réussi, avec le temps, à construire une confiance en lui pour mieux vivre avec sa maladie. Une confiance qui lui permet d’oublier peu à peu le poids de la maladie, sans pour autant oublier d’en prendre soin. Et concrètement ? Aujourd’hui il pratique ses surveillances glycémiques sans les oublier, ni craindre de les oublier : une routine bien ficelée ! « Maintenant c’est un truc qui m’accompagne. Comme un partenaire on va dire, un copain, un ami », dit-il en riant. Pourtant, tant de choses lui rappellent sa maladie et lui demandent un effort pour l’accepter sans mal le vivre…

L’importance d’être décideur de son traitement

Alexandre est un optimiste. Ni son diabète, ni son traitement n’ont changé l’image qu’il a de lui-même. Il nous raconte qu’en utilisant les stylos d’insuline, il conserve une forme de discrétion de sa maladie aux regards des autres. Il lui semble à l’inverse que la pompe à insuline le stigmatiserait comme une personne « malade ». « Je pense qu’avec la pompe je n’aurais pas la même image du diabète qu’actuellement avec les stylos. Ça j’en suis pratiquement sûr et certain ! C’est plus visible aux yeux des gens. »

En concertation avec son médecin, Charlotte a fait le choix de la pompe à insuline. Pourtant, dans les débuts elle ne l’assumait pas totalement… Ça prend du temps ! « C’est vrai que parfois, j’ai adopté le principe de l’accrocher sur mon soutien-gorge au milieu de la poitrine donc je me dis qu’on ne la voit pas. » Charlotte préfère que ce soit discret mais au fond, pour elle, peu importe le regard des autres sur ce qu’elle fait concernant son diabète. En revanche, au fur et à mesure, elle s’est surprise à avoir envie de parler aux autres de sa maladie, du traitement et surtout à réussir à aider ses pairs à l’accepter. « Je me rappelle d’avoir interpellé la personne qui discutait à voix basse avec quelqu’un. Du coup je leur ai dit : « vous vous posez des questions ? C’est juste une injection d’insuline, ce n’est pas une drogue. C’était plus pour leur dire de quoi il s’agissait que leur mettre les points sur les i, car moi ça ne me gênait pas de faire mon injection ».

Du haut de ses 27 ans, Margaux résume les étapes et les temps d’apprentissage de l’acceptation de la pompe à insuline : il y a tout d’abord le temps de l’appréhension du passage à la pompe à insuline, puis celui de l’adaptation, et enfin de l’habitude. Dorénavant, la pompe à insuline fait partie d’elle et de son quotidien. Elle n’y fait plus attention, même si ça reste, selon Margaux, « super moche » ! « Je me sens moins féminine justement à cause de ce cathéter sur mon ventre ». Elle estime que ce n’est pas aisé de s’habiller avec la pompe surtout en période d’été où elle trouve que le capteur sur le bras est « horrible », et du coup « on met des vêtements qui sont un peu moins mignons », déclare-t-elle. Mais Margaux précise que le seul avis qui compte c’est celui de son compagnon. Depuis que ce dernier a montré que cela ne le gênait pas, elle n’y pense plus. Malgré les difficultés liées au diabète, on peut parfois apprendre sur soi et en rire dans le couple, ce qui nous rend plus fort.

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