QUALIMED – Phase 2

Étude qualitative sur l’expérience du système de Boucle Fermée Hybride (BFH) constitué de la pompe à insuline MiniMed™ 780G, du Capteur de Glucose en Continu (CGC) Guardian™ Sensor 3 et de l’algorithme SmartGuard™

Les patients atteints d’un diabète de type 1 (DT1) sont insulino-dépendants, c’est-à-dire que l’administration régulière d’insuline est vitale pour eux. Cette tâche est souvent considérée comme contraignante. Dans le but de diminuer la charge mentale associée à l’insulinothérapie et d’améliorer leur qualité de vie, le système de Boucle Fermée Hybride (BFH) permet de réguler la glycémie de manière automatique sur la base des données transmises par les patients (les glucides du repas et la pratique d’une activité physique doivent être renseignés). Medtronic a développé son propre système constitué de la pompe à insuline MiniMed™ 780G, du Capteur de Glucose en Continu Guardian™ Sensor 3 et de l’algorithme SmartGuard™. Une première étude a été réalisée par le Diabète LAB pour mieux connaître les expériences associées à l’utilisation du système de BFH de Medtronic après 3 mois d’utilisation. Cette deuxième étude a suivi quatre patients pendant six mois afin de savoir comment se passait l’appropriation de ce dispositif.

Méthodologie

Nous avons réalisé des entretiens semi-directifs avec 4 adultes ayant utilisé le système de Medtronic une semaine après l’inclusion dans l’étude, puis trois et six mois après. L’objectif principal était d’évaluer l’évolution de l’expérience des utilisateurs de ce système au cours de ces six mois. Les objectifs secondaires étaient d’évaluer l’impact du système BFH sur la qualité de vie des patients et d’identifier les facteurs susceptibles de limiter l’adhésion à ce système.

Résultats

Au fil des mois, l’expérience des participants s’était améliorée notamment grâce à une meilleure compréhension de l’algorithme SmartGuard™. Les entretiens réalisés suggèrent que ce dispositif était susceptible d’améliorer leur équilibre glycémique, leur vie professionnelle, la charge mentale et enfin la qualité de leur sommeil. Toutefois, si les bénéfices de la BFH ont été fortement appréciés les premières semaines, la perception des désagréments associés aux calibrations (alarmes, réveils nocturnes, sorti du système) a eu tendance à augmente au fil du temps.

Conclusion

Les entretiens suggèrent que ce dispositif est bien et rapidement approprié par ses utilisateurs. Cette technologie pourrait diminuer le fardeau de la maladie des personnes DT1 et améliorer leur qualité de vie. Le développement d’un capteur de glucose en continu ne nécessitant pas de calibration permettrait d’améliorer les bénéfices de ce dispositif de BFH.

Environ 10% des personnes diagnostiquées diabétiques prises en charge pharmacologiquement sont atteintes d’un diabète de type 1 (DT1). Ces personnes, dites insulinodépendantes, doivent effectuer une administration régulière d’insuline. Si cette hormone permet d’éviter les hyperglycémies (responsables de complications pouvant être mortelles dans cette population), elle peut également induire des hypoglycémies souvent invalidantes et également parfois fatales. La meilleure gestion possible de l’insuline est donc très importante pour les DT1. Toutefois, cette auto-gestion est rendue d’autant plus difficile que de nombreux facteurs peuvent impacter la glycémie, tels que l’activité physique, l’alimentation ou encore les cycles hormonaux. Dans ce contexte la gestion de l’insuline est souvent chronophage, participe au fardeau de la maladie et elle est plus généralement à l’origine d’une diminution de la qualité de vie des personnes avec un DT1.

Ces difficultés semblent en partie palliées par les dispositifs intégrant la technologie de Boucle Fermée Hybride (BFH). Cette technologie permet de doser de façon automatique l’insuline délivrée par une pompe à insuline (PAI) grâce aux données transmises par un Capteur de Glucose en Continu (CGC) préalablement analysées par un algorithme. Parmi les BFH existantes, Medtronic a développé son propre système constitué de la PAI MiniMed™ 780G, du CGC Guardian™ Sensor 3 (et de son transmetteur le Guardian™ Link 3) ainsi que de l’algorithme SmartGuard™.

Alors que plusieurs études ont montré que ce système permettait d’améliorer le temps dans la cible glycémique, principal indicateur de l’équilibre glycémique, et de réduire les hypoglycémies, peu d’entre elles se sont intéressées aux impacts de cette technologie sur la qualité de vie des personnes diabétiques. Afin de mieux comprendre les impacts du système de BFH avec l’algorithme SmartGuard™ sur la qualité de vie de ses utilisateurs, le Diabète LAB a réalisé deux études. Celle présentée dans cet article est une étude qualitative longitudinale menée auprès de 4 patients DT1 utilisant ce dispositif pendant six mois. La précédente étude est accessible ici.

Méthodologie

« QUALIMED Phase 2 » est une enquête qualitative portant sur 4 adultes DT1 ayant utilisé le système de BFH avec l’algorithme SmartGuard™ pendant 6 mois, entre mai et novembre 2021. Nous avons réalisé des entretiens directifs à trois temps différents : lors de la mise en place du système SmartGuard™, puis après trois et six mois d’utilisation. Au total, ce sont 12 entretiens qui ont été réalisés.

L’objectif principal de l’étude était d’évaluer l’évolution de l’expérience patient à 3 et 6 mois après l’inclusion dans l’étude. Les objectifs secondaires étaient d’évaluer l’évolution de l’impact de l’algorithme SmartGuard™ sur la qualité de vie des personnes DT1 et d’identifier les facteurs susceptibles de limiter l’adhésion des utilisateurs à ce système.

Résultats de l’étude

La moyenne d’âge des participants était de 47 ans, avec une durée moyenne de vie avec le diabète de 27 ans. Tous les patients rencontrés pour cette étude étaient encore dans la vie active.

Si l’activation de l’algorithme SmartGuard™ s’était traduite par des bénéfices immédiats sur la gestion de la glycémie, il a été difficile pour les répondants de laisser un algorithme prendre le relais sur la gestion de l’insulinothérapie dans un premier temps. Ceci se traduisait par :

  • Une vérification régulière de la glycémie afin de contrôler l’efficacité, la fiabilité et la sécurité de l’algorithme.
  • L’injection de bolus de correction.

Concrètement, les vérifications régulières de la glycémie ne permettaient pas, dans un premier temps, d’alléger totalement le fardeau de la maladie. L’injection de bolus de correction était susceptible de diminuer la performance de l’algorithme, entraînant de fait une gestion glycémique suboptimale, ce qui induisait de nouvelles vérifications, de nouvelles corrections… CQFD !

« Bah je regarde quand même. Au départ, je regardais beaucoup ! Je regardais parce que bon je me suis dit c’est un ordinateur, ce n’est pas un humain. J’ai du mal à faire confiance. Maintenant je me dis, avec du recul, je me dis, on laisse monter de toute manière il gère. J’ai vu qu’il gérait, au bout d’un moment, voilà… ça va. » – Mme TZ

Après quelques semaines d’utilisation, les participants ont constaté le bon fonctionnement de l’algorithme, notamment la nuit (moment où ils ne pouvaient de fait pas agir). La confiance dans cet algorithme a été construite et a été solidifiée avec le temps, permettant aux patients de profiter des bénéfices associés à la BFH.

La BHF a eu un impact très positif sur la vie professionnelle des usagers. Avant la mise en place de l’algorithme, les hypoglycémies pouvaient entraîner des désagréments durant la journée comme de la fatigue ou un manque de concentration.

« Ça a été une très très bonne chose. Parce que du coup je fais beaucoup moins d’hypoglycémie, j’en fais pratiquement plus comme je vous ai dit. Des hypers j’en fais très très peu. Donc je suis beaucoup plus sereine. A appréhender la voiture, à aller chez les gens. Enfin voilà, j’ai plus de stress permanent à regarder toutes les 5sc la glycémie. Ca me prenait une charge mentale terrible. Là, la charge mentale a bien diminuée, voire pas disparue, mais quasiment. » – Mme BE

Comme peut en témoigner Madame BE, la BHF a permis de retrouver une certaine tranquillité pour les nombreux trajets professionnels qu’elle était amenée à réaliser. Avant l’activation de la BFH, celle-ci réalisait de très nombreux contrôles glycémiques (plus de 30 par jour) et après 3 mois d’utilisation de la BHF, elle n’en réalisait plus qu’une dizaine.

La BFH a permis d’améliorer le sommeil des participants. Les personnes interrogées faisaient fréquemment l’expérience d’hypoglycémies nocturnes, responsables de réveils intempestifs parfois et de fatigue souvent. Après six mois d’utilisation, tous les participants ont rapporté une nette amélioration de la qualité de leur sommeil, avec une diminution importante des réveils associés aux hypoglycémies durant la nuit.

 « J’ai plus ces hyperglycémies, j’ai plus les hypos la nuit, parce que j’en faisais quand même fréquemment entre minuit et 4 h du matin. Je pouvais faire ce que je voulais, je n’y arrivais pas. Et après je me retrouvais en hyper, après ce phénomène. Avec ces décharges d’hormones supplémentaires. En tout cas j’étais toujours en hypoglycémie, resucrage et des glycémies élevées qui montaient en plus du petit-déj post prandial. J’ai plus ces phénomènes-là. Moi je trouve que c’est quand même très très bien. » – Mme AC

Le témoignage de Madame AC a illustré l’impact de la BFH sur le sommeil. La variation des taux de glycémie durant la nuit fatiguait énormément les participants et demandait beaucoup d’énergie pour pouvoir retrouver un équilibre glycémique. Ceci représentait un fardeau de la maladie important pour ces patients.

La BFH a permis de diminuer le fardeau de la maladie associée à l’insulinothérapie. Les pensées intrusives étaient moins fréquentes. L’anxiété associée à la gestion de la maladie était réduite. Les participants avaient l’impression de vivre un peu plus « normalement » chaque jour.

« Mais ouai dans l’ensemble si je prends un peu de recul, c’est un gros gain pour mon quotidien. » – M. ME

Cette diminution du fardeau de la maladie, illustrée par les propos de Monsieur ME, a permis aux participants de constater une amélioration de leur qualité de vie et de pouvoir mieux vivre leur maladie au quotidien.

Si de façon générale le système de BFH a été apprécié par les participants pour ses impacts positifs sur l’équilibre glycémique et la qualité de vie, le CCG Guardian™ Sensor 3 s’est avéré être la principale limite de ce système.

Celui-ci nécessitait en effet la réalisation d’une initialisation puis d’au moins 2 calibrations par jour pour fonctionner. Son dysfonctionnement ne signifiait pas tant l’absence de données glycémiques que l’arrêt de l’algorithme Smartguard™, c’est-à-dire de gestion automatisée de l’insulinothérapie. Si dans les premières semaines d’utilisation cette contrainte était perçue comme relativement minime par rapport aux bénéfices de la BFH, les personnes interrogées ont toutes dû développer des stratégies pour pallier ces contraintes au bout des six mois.

« Il faut un peu s’organiser je dirais au départ, pour changer le capteur le matin. Je me suis fait avoir parce que j’ai changé un après-midi et du coup, j’ai été réveillée la nuit pour faire la calibration. Parce que la première calibration, elle tient 6h, la 2ème aussi et après c’est à partir de 12h quoi, c’est ça qui est un peu surprenant, mais bon… C’est un détail, il faut juste s’organiser pour le faire le matin pour ne pas être réveillé au milieu de la nuit. » – Mme TZ

Alors que l’initialisation de chaque nouveau capteur, changé généralement tous les 7 jours,était initialement faite en fin d’après-midi, voire en début de soirée, celle-ci a rapidement été réalisée durant la matinée par l’ensemble des participants, comme en témoigne Madame TZ. En effet, l’initialisation prenait plusieurs heures, durant lesquelles des alarmes informaient les participants qu’ils devaient entrer de nouvelles valeurs glycémiques… Une situation qui était jugée comme peu propice au sommeil, si les alarmes retentissaient durant la nuit. De la même façon, les participants faisaient en sorte de réaliser les calibrations en fin de soirée afin de ne pas être réveillés.

Quelques semaines avant l’entretien à 6 mois, Medtronic a annoncé l’arrivée très prochaine en France du Guardian™ 4 Sensor ne nécessitant pas de calibration. Ce nouveau capteur a fait l’objet de beaucoup d’attentes chez les personnes interrogées qui, toutes, l’ont spontanément évoqué.

Conclusion

Cette étude qualitative, longitudinale a été menée auprès de 4 personnes DT1 suivies pendant 6 mois.

L’objectif principal de l’étude était d’évaluer l’évolution de l’expérience patient à 3 et 6 mois après l’inclusion dans l’étude. Les entretiens évoquaient une meilleure appréhension du système SmartGuard™ tout au long des six mois.

Les objectifs secondaires étaient d’évaluer l’évolution de l’impact du SmartGuard™ sur la qualité de vie des patients et d’identifier les facteurs susceptibles de limiter l’adhésion des utilisateurs à ce système. La qualité de vie des patients a été améliorée au cours des six mois de l’étude, sur plusieurs points comme l’équilibre glycémique, la vie professionnelle, la charge mentale et enfin, le sommeil. Le principal facteur limitant était le CGC Guardian™ Sensor 3 dont les calibrations étaient de moins en moins appréciées.

Cette étude suggère que le système de BFH de chez Medtronic est susceptible d’améliorer la qualité de vie des personnes DT1 ainsi que de diminuer le fardeau de la maladie. L’amélioration du CGC pourrait avoir des bénéfices importants.

Remerciements : Nous souhaitons remercier chaleureusement toutes les personnes ayant accepté de participer à cette enquête. Nous remercions également la Pr. Laurence Kessler qui nous a permis d’interroger les personnes incluses de son essai clinique, ainsi que Mme Fatema Fall-Mostaine, infirmière de recherche clinique, qui a assuré toute la coordination.

Liens d’intérêts : Cette étude a été financée par Medtronic. Nicolas Naïditch déclare avoir reçu une rémunération et avoir bénéficié d’un hébergement pour sa participation à trois congrès ainsi que pour l’écriture d’un article pour la branche Neurostimulation de l’industriel Medtronic.

Auteurs : Nicolas Naïditch, Coline Hehn.

 

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